J’aime retrouver les fleurs jusque sur ma table de chevet 🙂 J’ai ainsi lu plusieurs romans sur les fleurs au cours des dernières années. Le dernier en date est Les fleurs sauvages, que l’on doit à l’écrivaine Holly Ringland. Tant que l’histoire est encore à peu près fraîche dans mon esprit (je l’ai terminée il y a quelques jours, mais j’ai un petite tête !), je vous partage mes impressions.
Présentation et résumé de l’histoire
Commençons par un petit résumé du livre (sans spoiler/divulgâcher quoi que ce soit !). L’histoire se concentre sur le personnage d’Alice Hart, une jeune australienne qui grandit dans une famille marquée par la violence domestique. Elle a 9 ans au début de l’intrigue et vit au bord de l’océan. À la suite d’un événement tragique, l’enfant est recueillie par June, sa grand-mère paternelle. Cette dernière vit dans une ferme horticole isolée, où elle cultive des fleurs sauvages avec l’appui d’un groupe de femmes. Au contact de la nature et au fil de ses rencontres, la jeune fille essaye tant bien que mal de panser ses blessures.
Ce récit fictif suit Alice à différentes étapes de sa vie, de son enfance à l’âge adulte. Au travers des enseignements de June et des femmes qui l’ont précédée, l’héroïne se familiarise avec le langage secret des fleurs… Mais comment se libérer des ombres du passé et s’épanouir pleinement quand les secrets de famille se font trop lourds ?
Les fleurs sauvages est le premier roman d’Holly Ringland, originaire d’Australie. L’œuvre a été publiée en 2018 avec pour titre original The Lost Flowers of Alice Hart. On doit la version française (2019) à la traductrice Anne Damour. Le roman a remporté un prix aux Australian Book Industry Award 2019 (mais je ne saurais établir une comparaison avec un prix français pour mesurer le « prestige » de cette distinction) et a été adapté en minisérie télé en 2023. Ces marques de reconnaissance n’ont pas influencé mon choix lors de l’achat du livre, car c’est dans le cadre de la rédaction de cette critique que j’ai découvert ces faits.
Ma rencontre avec ce livre
En vacances en Franche-Comté l’été dernier, c’est sous une forte pluie que mon mari et moi avons découvert Besançon. La ville organisait ce jour-là sa grande braderie d’été (nous l’ignorions). Slalomant entre les gouttes, les étals des exposants et la foule (que la météo n’avait pas refroidie, en tout cas pas au sens figuré), nous avons trouvé refuge quelques minutes dans une librairie qui m’a attirée. Les jours précédents, déjà très humides, m’ayant au moins permis de bien avancer dans mes lectures de vacances, j’avais en tête de m’acheter un nouveau bouquin. Notre passage à la librairie L’Intranquille fut un moment très agréable. Je ne vous cache pas qu’être au sec et au chaud quelques minutes a certainement rendu cette visite d’autant plus agréable, mais j’y retournerai volontiers sous un grand soleil aussi, en espérant que l’occasion se présente un jour ! Dans cette boutique, j’ai eu la joie de découvrir une sélection de livres sur le thème des fleurs et du jardin. Je me suis permis de prendre en photo cette jolie tête de gondole décorée d’une glycine en papier. Je ne sais pas vous, mais moi cela me donne envie d’acheter tous les livres exposés 😀 Cela dit j’ai été raisonnable et me suis limitée à l’un d’entre eux (que mon gentil mari a insisté ensuite pour m’offrir ; alors merci à lui !).
Je vous partage mes photos, qui vous donneront peut-être des idées de lecture.
Tout cela pour dire que la découverte du roman de Holly Ringland est associée pour moi à un bon souvenir de vacances, et que cela a pu influencer mon appréciation du livre, même si je ne l’ai finalement lu qu’au cours des dernières semaines. Je ne regrette pas d’avoir attendu, car j’ai eu plaisir à fuir la grisaille et la fraîcheur automnale de l’Isère en me plongeant dans l’atmosphère chaude de l’Australie !
Mon avis sur Les fleurs sauvages
Je suis généralement d’avis qu’il faut garder le meilleur pour la fin 🙂 Je commence donc par vous évoquer mes réserves, avant de vous partager ce qui m’apparaît comme les points forts du livre.
Quelques sujets de déception
Comme je l’explique plus bas, les premiers mots du roman m’ont grandement marquée. Je les ai trouvés très forts. Hélas, je n’ai pas retrouvé cette puissance des mots dans le reste de l’œuvre. J’espérais trouver des petites « pépites », le genre de phrases qui vous bouleversent par leur justesse ou par l’émotion qui s’en dégage. J’avais gardé à portée de main un crayon à papier et des marque-pages pour collecter des extraits à vous citer, mais je n’ai finalement rien relevé. Attention, je ne dis pas que je trouve cela mal rédigé. Je n’oublie pas qui plus est qu’il s’agit d’un premier roman et que j’en ai lu une traduction. L’écriture est fluide, les descriptions sont riches, le texte me semble plutôt bien rythmé. Je n’ai juste pas été transportée par les mots, comme je le suis parfois avec d’autres lectures.
Le roman célèbre la beauté et la force de la nature. Les descriptions de paysages sont très nombreuses. L’omniprésence des fleurs ne manquera pas de plaire à toutes celles et ceux qui les aiment grandement. Cependant, je trouve que le sujet du langage des fleurs, censé être très important dans l’histoire des femmes de la ferme de Thornfield, est finalement assez peu exploité. Certes, chaque chapitre est introduit par une nouvelle fleur, dont on nous donne la « signification ». Pour autant, il ne m’a pas semblé que cet aspect-là donnait beaucoup de consistance à l’histoire ou de liant à l’intrigue. Il se peut cependant que ma mémoire ou ma concentration me joue des tours.
Par ailleurs, je regrette que les atermoiements d’Alice ne ressortent pas davantage dans le récit. La culpabilité n’est pas assez traitée et trop peu palpable, à mon sens, dans les chapitres 14 et 15. (Je n’entre pas dans les détails par respect pour les personnes qui voudraient lire ce roman.) Peut-être que le fait que l’histoire soit rédigée à la troisième personne du singulier ne facilite pas la perception des états d’âme de l’héroïne ; sans certitude. Il est possible que mon jugement soit juste déformé par trois décennies de pratique assidue de l’autoculpabilisation.
J’achève ma liste de points négatifs avec un élément qui m’a contrarié : le manque de marges intérieures ! C’est certainement un détail, mais je suis sensible à l’ergonomie et je n’aime pas devoir tordre ou appuyer fort sur un bouquin pour bien lire les mots les plus à l’intérieur. Avis à l’éditeur…
Plusieurs motifs de satisfaction
Place à présent aux points positifs que je dégage de ma lecture. Tout d’abord, je trouve que Les fleurs sauvages aborde de nombreux sujets intéressants et plus profonds qu’il n’y paraît. Parmi eux, celui de l’émancipation. Comment s’affirmer et assumer ses choix, se libérer d’un destin tout tracé ? Cela résonne avec mes propres questionnements du moment sur la loyauté familiale, cette propension que nous avons, souvent de manière parfaitement inconsciente, à reproduire des schémas familiaux pour ne pas décevoir « son clan ». Holly Ringland retranscrit bien, à mon sens, la difficulté pour chacun·e de se (re)construire dans un champ de ruines… émotionnel.
Je n’aimerais pas cataloguer ce livre en disant qu’il s’agit d’une histoire « pour femmes », en tout cas il s’agit indéniablement d’une histoire « de femmes ». Des battantes, des malmenées par la vie ; des héroïnes du quotidien. Dans la ferme de sa grand-mère, Alice vit entourée de femmes de tous âges. Il règne dans cette ferme de fleurs une belle solidarité, et même une véritable sororité.
Sur un tout autre sujet, j’ai grandement apprécié les descriptions faites des chiens. On en croise plusieurs au côté de l’héroïne, à différentes étapes de sa vie. Je trouve que les mots employés pour décrire l’attitude de ces canidés sont d’une grande justesse. Tous ceux qui ont déjà eu un chien reconnaîtront certainement un peu le leur au travers des mots de l’écrivaine. D’ailleurs, c’est peut-être simplement parce que j’ai déjà eu des chiens que leurs portraits m’ont parlé. Dans la même logique, si je n’ai pas été vraiment émue par les descriptions de paysages et de fleurs, c’est peut-être parce que je n’ai jamais mis les pieds en Australie. Les végétaux évoqués par l’auteure m’étaient souvent complètement inconnus, et bien que chaque chapitre permette de se familiariser un peu avec l’aspect d’une nouvelle espèce, tout cela est resté assez abstrait pour moi.
Les descriptions des paysages et des fleurs ne m’ont pas provoqué autant d’émotions qu’espéré, donc, mais ils m’ont offert malgré tout un beau voyage littéraire. De mémoire, c’est la première fois que je lisais un roman dont l’intrigue se déroule en Australie. En grande frileuse que je suis, je me suis enrobée avec délectation de la chaleur des journées et de la douceur des nuits du pays des kangourous ! On découvre divers paysages, du bord de l’océan aux grands espaces désertiques, sans oublier la ferme florale isolée.
Un autre motif de satisfaction concerne l’esthétique du livre. Les fleurs sauvages est selon moi un livre élégant, dans tous les sens du terme. Au-delà de sa couverture attrayante, on a la bonne surprise de découvrir que chaque partie et chaque chapitre du livre sont ornés d’un dessin de fleur, façon planche de botaniste. Le noir et blanc ne permet pas d’apprécier la teinte des fleurs, mais les descriptions fournies par l’auteure compensent en partie ce manque. J’ai été sensible aussi à un petit détail : la présence d’un ornement végétal pour créer des séparations entre certains paragraphes. Une fine feuille (qui semble dessiner un sourire), c’est tout de même plus joli que le traditionnel astérisme, non ?
J’estime que ce roman assez épais (près de 500 pages pour l’édition Le Livre de Poche) offre la juste quantité de rebondissements. Il se passe beaucoup de choses, sans que les péripéties s’enchaînement à un rythme effréné. Je tiens à souligner aussi que par sa construction, ce livre ne cède pas, me semble-t-il, à la mode du « page-turner ». La fin d’un chapitre ne provoque pas le désir quasi irrépressible d’entamer le suivant !
Comme beaucoup, je suppose, j’accorde de l’importance à l’incipit d’un livre. Lorsque je suis dans une librairie et que le titre ou la couverture d’un livre m’attire, je parcours d’abord la quatrième de couverture. Après quoi, si l’ouvrage a retenu mon attention, je lis les premiers mots ou les premières phrases. Dans le cas du roman Les fleurs sauvages, je n’ai pas été déçue. Je le trouve remarquable. Jugez plutôt :
« Dans une maison en bardeaux au bout du chemin, la petite Alice Hart de neuf ans, assise à son bureau devant la fenêtre ouverte, rêvait aux moyens de mettre le feu à son père. »
C’est avec les premiers mots du roman que j’achève ma critique du livre Les fleurs sauvages / The Lost Flowers of Alice Hart.
Si vous l’avez vu vous aussi ou le découvrez à votre tour, j’aurai grand plaisir à connaître votre avis dans l’espace commentaires.